Il était le petit fils de Moses!
Ce fondateur du "judaïsme réformé" a obtenu des droits civiques pour sa communauté, dans la deuxième moitié du 18ème siècle, dans une Prusse où Frédéric II fait la pluie et le beau temps: cujus regio ejus religio a signifié plein de choses différentes depuis la Paix d'Augsbourg.
Felix Mendelssohn, le petit-fils, jouissait donc d'un statut bizarre dans ce monde luthérien du "business" (Geschäft, plutôt), mais aussi des arts, d'une forme de Aufklärung et néanmoins encore fort judaïque, même sorti des ghettos.
Sa cinquième symphonie (qui devrait occuper la deuxième place, chronologiquement) ne fait pas forcément partie des "vedettes" pour le public belge ou français. Mon anecdote personnelle le prouve.
Quoique n'étant pas incollable, il m'arrive souvent de reconnaître les morceaux de musique qui passent "sur le poste", ou en tout cas de les situer. Ma mère, elle, est beaucoup plus érudite et collée en musicologie, en tout cas jusqu'à l'aube du 20ème siècle. Et pourtant, nous circulions en voiture quelque part entre le frontière luxembourgeoise et le Massif central et une musique "classique", mais pas totalement, qui était un peu beethovienne, mais aussi un peu du Haydn et quand même plus bombastique, nous avait plu.
Bien sûr, ma mère aurait reconnu la symphonie "italienne" ou "écossaise" de Félix Mendelssohn, mais pas cette "Réforme". Nous n'avons même pas évoqué son nom. Cujus area ejus praejudicia en quelque sorte.
Berlioz (un contemporain) se moquait gentiment des musiques religieuses, surtout si elles n'étaient pas "à programme". Et, au moment de l'écriture de cette pièce au moins, Beethoven qui vient de mourir pèse encore de tout le poids de son génie sur les compositeurs en pleine création. Vienne et son classicisme (relatif) n'ont pas encore totalement cédé à la déliquescence des romantiques pur jus. Résultat: Simrock fut le premier éditeur de cette oeuvre ... en 1868; l'auteur est mort depuis 20 ans.
Ensuite, les différents antisémitismes dans les pays européens de culture font leur travail de sape. Dans l'Allemagne nazie, il est interdit de le jouer.
Cet homme, une coqueluche à sa propre époque, ami des plus grands (décrié, et jalousé sans doute, par Wagner toutefois), me semble effectuer un retour en grâce. Il conserve le côté rassurant des compositeurs classiques, fait preuve de la spontanéité et des "sautes d'humeur" des romantiques et annonce peut-être même "l'âme russe" qui va suivre.
Je vous le dis (en vérité, haha): tout est caché dans l'ADN.
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